Djibouti : Quand les « braquages » effacent les preuves — une tactique récurrente du régime mafieux de Djibouti?

Djibouti : Quand les « braquages » effacent les preuves — une tactique récurrente du régime mafieux de Djibouti?

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Par notre correspondant à Djibouti — Dimanche 21 septembre 2025

Ce dimanche matin, un événement inédit secoue la capitale djiboutienne : un braquage armé vise l’agence de la Salam Bank au centre commercial Hamoudi. Selon les autorités, des hommes armés auraient fait irruption vers 8h, tiré sur une vitre, emporté une somme non précisée, puis disparu sans laisser de trace. Spectaculaire ? Sans doute. Mais pour les observateurs avertis, ce « premier braquage » de l’histoire du pays s’inscrit dans un schéma troublant : celui de la destruction opportune de documents sensibles, justifiée par des incidents « accidentels » ou criminels.

Depuis des années, le régime de Djibouti a développé une spécialité : faire disparaître des preuves gênantes sous couvert d’incendies, de vols ou de catastrophes techniques. En 2017, l’incendie mystérieux des archives fiscales du ministère des Finances avait permis d’effacer des dossiers liés à des contrats douteux avec des entreprises chinoises. Aucune enquête sérieuse n’avait été menée. En 2020, un « vol/incendie » au siège de la Cour des comptes avait ciblé exclusivement les dossiers d’audit sur les marchés publics liés au port de Doraleh — un projet entouré de soupçons de corruption. Les caméras de surveillance ? « Hors service ce jour-là », selon le rapport officiel.

En 2022, un incendie dans un entrepôt de la Douane nationale a détruit des milliers de documents douaniers relatifs à des importations suspectes. Coïncidence : ces dossiers étaient sur le point d’être transmis à une mission d’audit de l’UE. En 2023, un « piratage informatique massif » a frappé le ministère de la Justice, effaçant des procès-verbaux d’interrogatoires dans des affaires de torture. Les experts indépendants n’ont jamais été autorisés à mener une investigation.

Le braquage de la Salam Bank ce dimanche s’inscrit dans cette logique. Pourquoi cette agence, précisément ? Pourquoi ce jour-là ? La Salam Bank, bien que prétendu islamique et locale, gère des comptes sensibles, notamment ceux d’entreprises liées à des contrats d’État, à des fonds de pension, ou à des transferts internationaux peu transparents. Selon des sources bancaires anonymes, l’agence Hamoudi abritait depuis peu un serveur de sauvegarde contenant des relevés de transactions datant de 2018 à 2024 — une période marquée par des soupçons de détournements massifs liés aux chantiers militaires étrangers.

Le modus operandi est toujours le même : un événement violent ou accidentel, médiatisé comme une première, suivi d’un silence radio sur les enquêtes, et enfin, l’absence de restitution ou de compensation. Les caméras ne fonctionnent pas. Les témoins disparaissent. Les rapports d’enquête ne sont jamais publiés. Et les dossiers… brûlés, volés, effacés.

Les experts en sécurité financière s’interrogent : comment des braqueurs, dans un pays où la police quadrille chaque rue, parviennent-ils à pénétrer un centre commercial ultra-surveillé, à tirer sans être interceptés, et à s’enfuir sans la moindre trace ? Aucun véhicule suspect n’a été signalé. Aucune arrestation n’a été annoncée. Et surtout, aucune estimation du butin n’est communiquée — ce qui, dans un tel contexte, est hautement suspect.

Ce n’est plus de la malchance. C’est une méthode. Une stratégie de l’opacité. Le régime djiboutien, confronté à des pressions internationales croissantes sur la transparence financière et les droits humains, semble avoir choisi la voie de la destruction contrôlée. Chaque « incident » efface un chapitre embarrassant. Chaque « braquage » ouvre la porte à l’impunité.

La communauté internationale, longtemps silencieuse par intérêt géostratégique, doit ouvrir les yeux. Derrière ces faits divers spectaculaires se cache une machine bien huilée de dissimulation d’État. Le braquage de la Salam Bank n’est pas un fait divers. C’est un signal. Un signal que rien ne doit filtrer. Rien ne doit être prouvé. Et que, à Djibouti, la vérité se paie cash — ou disparaît dans la fumée d’un incendie, le fracas d’une vitre brisée, ou le silence d’un coffre vidé.

Hassan Cher

The English translation of the article in French.

Djibouti: When « Heists » Make Evidence Vanish — A Recurrent Tactic of the Mafia-Like Regime?

By our correspondent in Djibouti — Sunday, September 21, 2025

This Sunday morning, an unprecedented event shook the Djiboutian capital: an armed heist targeted the Salam Bank agency in the Hamoudi shopping center. According to the authorities, armed men allegedly burst in around 8 a.m., shot out a window, made off with an unspecified sum of money, and disappeared without a trace. Spectacular? Undoubtedly. But for seasoned observers, this « first armed robbery » in the country’s history fits a disturbing pattern: the convenient destruction of sensitive documents, justified by « accidental » or criminal incidents.

For years, the Djibouti regime has developed a specialty: making inconvenient evidence disappear under the guise of fires, thefts, or technical disasters. In 2017, the mysterious fire that destroyed the tax archives at the Ministry of Finance erased files related to dubious contracts with Chinese companies. No serious investigation was ever conducted. In 2020, a « theft/fire » at the headquarters of the Court of Auditors exclusively targeted audit files concerning public contracts linked to the Doraleh port—a project surrounded by corruption allegations. The surveillance cameras? « Out of service that day, » according to the official report.

In 2022, a fire in a National Customs warehouse destroyed thousands of customs documents related to suspicious imports. Coincidentally, these files were about to be handed over to an EU audit mission. In 2023, a « massive cyberattack » hit the Ministry of Justice, erasing interrogation transcripts in torture cases. Independent experts were never allowed to conduct an investigation.

Sunday’s heist at Salam Bank follows this same logic. Why this specific agency? Why that particular day? Salam Bank, though presented as a local Islamic bank, handles sensitive accounts, including those of companies linked to state contracts, pension funds, or opaque international transfers. According to anonymous banking sources, the Hamoudi agency had recently housed a backup server containing transaction records from 2018 to 2024—a period marked by suspicions of massive embezzlement linked to foreign military construction projects.

The modus operandi is always the same: a violent or accidental event, publicized as a first, followed by a media blackout on the investigations, and ultimately, a lack of restitution or compensation. The cameras don’t work. Witnesses disappear. Investigation reports are never published. And the files… are burned, stolen, erased.

Financial security experts are questioning: how do robbers, in a country where police monitor every street, manage to break into a highly surveilled shopping center, fire shots without being intercepted, and escape without a trace? No suspicious vehicles were reported. No arrests have been announced. And crucially, no estimate of the loot has been provided—which, in this context, is highly suspect.

This is no longer bad luck. It is a method. A strategy of opacity. Faced with growing international pressure regarding financial transparency and human rights, the Djibouti regime seems to have chosen the path of controlled destruction. Each « incident » erases an embarrassing chapter. Each « heist » opens the door to impunity.

The international community, long silent due to geostrategic interests, must open its eyes. Behind these spectacular news stories lies a well-oiled machine of state-sponsored concealment. The Salam Bank heist is not just a news item. It is a signal. A signal that nothing must leak out. Nothing must be proven. And that, in Djibouti, the truth is paid for in cash—or disappears in the smoke of a fire, the shattering of a broken window, or the silence of an emptied vault.

Hassan Cher

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Authored by: Hassan Cher Hared

Hassan Cher Hared