
Djibouti : Dates clés et personnalités importantes de l’indépendance de Djibouti — 27 juin 1977

1. Introduction
L’implantation française dans la région de Djibouti débute tragiquement avec l’assassinat du commerçant réunionnais Henri Lambert en 1859. En représailles, une mission navale capture les suspects et ramène une délégation du sultanat de Tadjourah. Cela conduit au traité du 11 mars 1862, cédant à la France la baie d’Obock.
Cependant, une activité significative ne démarre que vingt ans plus tard. Le contexte de la guerre du Tonkin, privant la France du port d’Aden, motive l’envoi d’une mission exploratoire fin 1883, confiée à Léonce Lagarde. Nommé « commandant à Obock » en juin 1884, Lagarde devient l’architecte de la colonie. Il étend rapidement l’emprise française : protectorat sur Tadjourah, occupation de la côte nord du golfe, puis traité avec les chefs Issas en mars 1885 pour la côte sud (Djibouti), formant le « protectorat d’Obock et dépendances ».
Un accord franco-britannique de 1888 fixe les limites côtières et ouvre les routes commerciales. Lagarde transfère alors le centre de gravité de la colonie d’Obock au sud, vers le site de Djibouti. Ce transfert s’achève en 1896, lorsque Djibouti devient le chef-lieu du territoire désormais nommé Côte française des Somalis (CFS), après la délimitation des frontières avec l’Italie.
2. Les dates clés du processus d’indépendance
Période de fondation coloniale
– 1888 : Choix de Djibouti-Ville comme capitale pour sa rade stratégique
– 1917 : Construction de la voie ferrée reliant Djibouti à la capitale éthiopienne
– 1949 : Rattachement de la monnaie djiboutienne au dollar américain
Les premiers signes de contestation (1958-1967)
– 1958 : Premier référendum révélant les divisions politiques sur la question de la décolonisation
– 1960 : Nomination d’Ali Aref Bourhan comme vice-président du Conseil de gouvernement
– 26 août 1966 : Événement déclencheur — Interruption du discours du président Charles de Gaulle par des indépendantistes djiboutiens place Lagarde
– Août 1966 : Érection du « barrage de la honte », ceinture de barbelés électrifiés sur 14,5 km avec miradors et champs de mines
– Septembre 1966 — mars 1967 : Sept mois de répression militaire intense (couvre-feu à 18h, répression violente)
– 19 mars 1967 : Référendum d’autodétermination maintenant les liens français, le territoire est rebaptisé « Territoire français des Afars et des Issas »
L’accélération du processus (1970-1977)
– Début des années 1970 : Première personne autochtone à obtenir le baccalauréat, révélant le retard éducatif
– 1975 : Situation économique critique avec un taux de chômage atteignant 80% à Djibouti
– Décembre 1975 : Tournant décisif — le Premier ministre français Pierre Messmer reconnaît officiellement la vocation du territoire à l’indépendance
– Février 1976 : Prise d’otages de Loyada perpétrée par le FLCS, causant la mort de 2 enfants français sur 31, de 7 membres du commando et de quelques soldats somaliens. Cet événement précipite le départ des Français.
– 16 décembre 1976 : Attentat contre le bar « Le Palmier en Zinc »
– Mars 1977 : Conférence de Paris définissant les modalités d’accession à l’indépendance
– Conférence d’Accra : Négociations entre partis Somalis et Afars quelques semaines après Paris
L’indépendance (1977)
– 8 mai 1977 : Référendum d’indépendance — 98,7% des votants plébiscitent l’indépendance
– 27 juin 1977 : Proclamation de l’indépendance de la République de Djibouti
– 27 juin 1977 (soir) : Démantèlement du « barrage de la honte »
– 27 juin 1977 (un peu avant minuit) : Annonce officielle par le président français Valéry Giscard d’Estaing depuis l’Élysée
– 30 juin 1977 : Adhésion à l’Organisation de l’unité africaine (OUA) comme 49e membre
3. Les leaders de l’indépendance djiboutienne
Mahmoud Harbi Farah (1921-1960) : le fondateur visionnaire en 1960
Adan Abdulle : Le président fondateur du FLCS en 1960
Abdourrahman Ardeye (1960-1966) : Le premier secrétaire général du FLCS
Abdourrahaman Ahmed Hassan dit « Gabode » (1966-1969) : l’intermédiaire
Aden Robleh Awaleh (1969-1977) : Le leader opérationnel
Ahmed Dini Ahmed
Hassan Gouled Aptidon
Sultan Habib : Chef local de la région de Tadjourah
Autres figures des mouvements indépendantistes : Des personnalités comme Obsieh Bouh Abdallah, Omar Ahmed Youssouf dit Vincent, Mohamed Dahan Abdallah, Ali Ahmed Oudoum dit Ali Oudoum, Abdillahi Waberi dit Bochari, Samod Farah Khaireh, Mohamed Osman Houffaneh, Omar Osman Rabeh, Moussa Doualeh Idleh dit Gadhleh, Ahmed Elmi Khaireh, Docteur Ahmed Mohamed Hassan, Omar Elmi Khaireh, Abdi Farah Chideh, Abdi Hassan Liban, Ali Houffaneh dit Jabha, Hassan Aden Kochin, Ibrahim Ali Daher, Idriss Hassan Akadir, Bouh Houssein dit Lahdil, Daher Aden Kochin du Front de libération de la Côte des Somalis (FLCS), ainsi que Ahmed Farah, Moussa Ahmed Idriss, Cheik Osman Waiss, Cheik Abdillahi Bodeh, Khaireh Kayad, Houssein Ali Chirdon, Djama Yacin Farah et Meraneh Amareh du Parti du Mouvement Populaire (PMP) ont également joué un rôle important dans la lutte pour l’indépendance.
Les dirigeants français
Charles de Gaulle (1890-1970)
Rôle : Président de la République française (1959-1969)
Événement marquant : Sa visite officielle du 26 août 1966 est interrompue par des manifestants indépendantistes place Lagarde. Cet événement déclenche sept mois de répression militaire et l’érection du « barrage de la honte », marquant un tournant dans l’accélération du processus d’autonomisation.
Pierre Messmer (1916-2007)
Rôle : Premier ministre français (1972-1974)
Action décisive : En décembre 1975, il reconnaît officiellement la vocation de la colonie à accéder à l’indépendance, ouvrant ainsi la voie aux négociations finales.
Valéry Giscard d’Estaing (1926-2020)
Rôle : Président de la République française (1974-1981)
Acte historique : Annonce officiellement la naissance de la République de Djibouti depuis son bureau de l’Élysée le 27 juin 1977, entérinant la décision du référendum du 8 mai.
4. Les mouvements politiques et organisations
Partis indépendantistes radicaux
– FLCS (Front de libération de la Côte des Somalis) : Mouvement radical soutenu par la Somalie, responsable de la prise d’otages de Loyada en février 1976
– MLD (Mouvement de libération de Djibouti) : Autre mouvement soutenu par la Somalie
Partis indépendantistes modérés
– LPAI (Ligue populaire africaine pour l’indépendance) : dirigée par Hassan Gouled Aptidon et Ahmed Dini.
– MPL (Mouvement populaire de libération) : Parti modéré soutenu par l’Éthiopie
– UNI (Union Nationale pour l’Indépendance) : Également soutenu par l’Éthiopie
Organisations de jeunesse
– U.D.C (Union pour le développement et la Culture) : Association éducative qui se politise progressivement
– U.N.I.C.A.S : Union nationale des étudiants de la Côte des Afars et Somalie – (Organisation étudiante portant les valeurs démocratiques)
5. Conclusion
L’indépendance de Djibouti le 27 juin 1977 résulte d’un processus complexe mêlant revendications internes, pressions géopolitiques régionales et évolution de la politique française de décolonisation. Les personnalités clés ont su naviguer entre les divisions ethniques internes et les pressions extérieures pour construire un État viable. Cette indépendance, obtenue pacifiquement après le référendum du 8 mai 1977,qui marque la fin de la présence coloniale française en Afrique continentale tout en maintenant des liens privilégiés entre les deux pays.
Hassan Cher
The English translation of the article in French.
Djibouti: Key dates and personalities of Djibouti’s independence – June 27, 1977
1. Introduction
French settlement in the Djibouti region began tragically with the murder of Reunion merchant Henri Lambert in 1859. In retaliation, a naval mission captured the suspects and brought back a delegation from the Sultanate of Tadjourah. This led to the treaty of March 11, 1862, ceding Obock Bay to France.
However, significant activity did not begin until twenty years later. The context of the Tonkin War, which deprived France of the port of Aden, led to the dispatch of an exploratory mission at the end of 1883, entrusted to Léonce Lagarde. Appointed “commandant à Obock” in June 1884, Lagarde became the colony’s architect. He rapidly extended the French hold: protectorate over Tadjourah, occupation of the northern coast of the Gulf, then treaty with the Issas chiefs in March 1885 for the southern coast (Djibouti), forming the “Protectorate of Obock and Dependencies”.
A Franco-British agreement of 1888 set the coastal limits and opened up the trade routes. Lagarde transferred the Obock colony’s center of gravity to the south, to the Djibouti site. This transfer was completed in 1896, when Djibouti became the capital of the territory now known as Côte française des Somalis (CFS), following the demarcation of borders with Italy.
2. Key dates in the independence process
Colonial foundation
– 1888: Djibouti-Ville chosen as capital for its strategic harbour
– 1917: Construction of the railroad linking Djibouti to the Ethiopian capital
– 1949: Djiboutian currency pegged to the US dollar
The first signs of protest (1958-1967)
– 1958: First referendum revealing political divisions on the issue of decolonization
– 1960: Appointment of Ali Aref Bourhan as Vice-President of the Governing Council
– August 26, 1966: Triggering event – Interruption of President Charles de Gaulle’s speech by Djiboutian independence fighters at Place Lagarde
– August 1966: Erection of the “Dam of Shame”, a 14.5 km belt of electrified barbed wire with watchtowers and minefields
– September 1966 – March 1967: Seven months of intense military repression (6 p.m. curfew, violent repression)
– March 19, 1967: Self-determination referendum maintaining French ties, territory renamed “French Territory of the Afars and Issas”
The acceleration of the process (1970-1977)
– Early 1970s: First native person to obtain the baccalaureate, revealing the educational backwardness
– 1975: Critical economic situation, with unemployment reaching 80% in Djibouti
– December 1975: Decisive turning point – French Prime Minister Pierre Messmer officially recognizes the territory’s vocation for independence
– February 1976: Loyada hostage-taking by the FLCS, resulting in the death of 2 out of 31 French children, 7 members of the commando and several Somali soldiers. This event precipitated the departure of the French.
– December 16, 1976: Attack on the bar “Le Palmier en Zinc”
– March 1977: Paris Conference defining the terms of independence
– Accra Conference: Negotiations between Somali and Afar parties a few weeks after Paris
Independence (1977)
– May 8, 1977: Independence referendum – 98.7% of voters approve independence
– June 27, 1977: Proclamation of independence of the Republic of Djibouti
– June 27, 1977 (evening): Dismantling of the “dam of shame”
– June 27, 1977 (just before midnight): Official announcement by French President Valéry Giscard d’Estaing from the Élysée Palace
– June 30, 1977: Djibouti joins the Organization of African Unity (OAU) as its 49th member.
3. Leaders of Djiboutian independence
Mahmoud Harbi Farah (1921-1960): The visionary founder in 1960
Adan Abdulle: The founding president of the FLCS in 1960
Abdourrahman Ardeye (1960-1966): The first Secretary General of the FLCS
Abdourrahaman Ahmed Hassan dit “Gabode” (1966-1969): the intermediary
Aden Robleh Awaleh (1969-1977): the operational leader
Ahmed Dini Ahmed
Hassan Gouled Aptidon
Sultan Habib: local chief of the Tadjourah region
Other figures in the independence movements: Personalities such as Obsieh Bouh Abdallah, Omar Ahmed Youssouf dit Vincent, Mohamed Dahan Abdallah, Ali Ahmed Oudoum dit Ali Oudoum, Abdillahi Waberi dit Bochari, Samod Farah Khaireh, Mohamed Osman Houffaneh, Omar Osman Rabeh, Moussa Doualeh Idleh dit Gadhleh, Ahmed Elmi Khaireh, Docteur Ahmed Mohamed Hassan, Omar Elmi Khaireh, Abdi Farah Chideh, Abdi Hassan Liban, Ali Houffaneh dit Jabha, Hassan Aden Kochin, Ibrahim Ali Daher, Idriss Hassan Akadir, Bouh Houssein dit Lahdil, Daher Aden Kochin of the Front de libération de la Côte des Somalis (FLCS), as well as Ahmed Farah, Moussa Ahmed Idriss, Cheik Osman Waiss, Cheik Abdillahi Bodeh, Khaireh Kayad, Houssein Ali Chirdon, Djama Yacin Farah and Meraneh Amareh of the Parti du Mouvement Populaire (PMP) also played an important role in the struggle for independence.
French leaders
Charles de Gaulle (1890-1970)
Role: President of the French Republic (1959-1969)
Significant event: His official visit on August 26, 1966 was interrupted by pro-independence demonstrators in Place Lagarde. This event triggered seven months of military repression and the erection of the “Dam of Shame”, marking a turning point in the acceleration of the independence process.
Pierre Messmer (1916-2007)
Role: French Prime Minister (1972-1974)
Decisive action: In December 1975, he officially recognized the colony’s vocation for independence, paving the way for final negotiations.
Valéry Giscard d’Estaing (1926-2020)
Role: President of the French Republic (1974-1981)
Historic event: Official announcement of the birth of the Republic of Djibouti from his office at the Élysée Palace on June 27, 1977, ratifying the decision of the May 8 referendum.
4. Political movements and organizations
Radical independence parties
– FLCS (Front de libération de la Côte des Somalis): Radical movement supported by Somalia, responsible for the Loyada hostage-taking in February 1976
– MLD (Mouvement de libération de Djibouti): Another movement supported by Somalia
Moderate pro-independence parties
– LPAI (Ligue populaire africaine pour l’indépendance): led by Hassan Gouled Aptidon and Ahmed Dini.
– MPL (Popular Liberation Movement): Moderate party supported by Ethiopia
– UNI (National Union for Independence): Also supported by Ethiopia
Youth organizations
– U.D.C (Union for Development and Culture): Educational association that is gradually becoming politicized
– U.N.I.C.A.S: Union nationale des étudiants de la Côte des Afars et Somalie – (Student organization promoting democratic values)
5. Conclusion
Djibouti’s independence on June 27, 1977 was the result of a complex process combining internal demands, regional geopolitical pressures and changes in French decolonization policy. Key personalities navigated internal ethnic divisions and external pressures to build a viable state. This independence, achieved peacefully after the referendum of May 8, 1977, marked the end of the French colonial presence in continental Africa, while maintaining privileged ties between the two countries.
Hassan Cher