
Iran/Nucléaire : Que fait Djibouti dans le programme nucléaire de l’Iran, d’après MehrNews ?

1. Qu’est-ce que le « Joint Comprehensive Plan of Action (JCPOA) » ?
Le Joint Comprehensive Plan of Action (JCPOA), ou Plan d’action global commun, est un accord international conclu en juillet 2015 et mise à jour en 2023 entre l’Iran et le groupe E3/EU+3 (France, Allemagne, Royaume-Uni, Union européenne, Chine, Russie et États-Unis). Son objectif principal est de garantir le caractère exclusivement pacifique du programme nucléaire iranien en échange d’une levée progressive des sanctions économiques internationales contre Téhéran.
Fonctionnement clé :
– Engagements iraniens : Limitation des capacités d’enrichissement d’uranium (3,67 %), réduction des stocks de matériaux fissiles, transformation du réacteur d’Arak pour empêcher la production de plutonium, et coopération renforcée avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).
– Levée des sanctions : Les sanctions de l’ONU, de l’UE et des États-Unis liées au nucléaire sont suspendues, permettant à l’Iran de réintégrer les marchés financiers et énergétiques mondiaux.
– Mécanismes de vérification : L’AIEA supervise les installations nucléaires iraniennes, tandis qu’une Commission conjointe (composée des signataires) arbitre les litiges via un processus de résolution des différends.
Le JCPOA a été endossé par la résolution 2231 du Conseil de sécurité de l’ONU (2015), faisant de lui un pilier du régime de non-prolifération nucléaire. Cependant, le retrait unilatéral des États-Unis en 2018 sous Donald Trump, suivi de la réimposition de sanctions, a fragilisé l’accord.
2. Surveillance de l’Iran dans le cadre du JCPOA : contradictions et interrogations
La surveillance du programme nucléaire iranien est officiellement confiée à l’AIEA, dont les inspections techniques sont encadrées par le JCPOA. Toutefois, des tensions persistent autour de deux axes majeurs :
- Implication contestée de pays tiers
- Les « articles à double usage », un prétexte à la surveillance élargie
- La méfiance envers l’AIEA et les « espions déguisés »
Le document officiel du JCPOA ne mentionne aucun rôle pour des pays comme l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, Djibouti ou le Qatar dans les mécanismes de surveillance. Pourtant, des déclarations politiques récentes, notamment une émission de la télévision MehrNews datée du 11 juin 2023, évoquent une « ingérence régionale » dans le processus. La traduction de l’émission de la télévision MehrNews est la suivante :
« Désormais, des pays tels que l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, Djibouti et le Qatar sont censés participer à la surveillance de l’Iran dans le cadre du Plan d’action global commun (JCPOA). Mais quel est le lien entre ces pays et ce sujet ? Il convient de noter que, comme le souligne l’ancien président iranien M. Rouhani la page 211 de son cinquième édition de son ouvrage ‘Sécurité nationale et diplomatie nucléaire’, certains agents de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) ont été qualifiés de « véritables espions déguisés en espions.
Par ailleurs, il est important de rappeler que les agents issus d’agences européennes ne devraient généralement pas se rendre en Iran avec une formation militaire ni y mener des activités de surveillance sécuritaire. Nous demandons donc une réduction de cette ingérence.
En ce qui concerne les articles à double usage – c’est-à-dire des technologies pouvant être utilisées à la fois à des fins civiles et militaires, comme les appareils à rayons X destinés aux applications médicales ou industrielles –, la nation iranienne doit porter une attention particulière à cette question. En effet, ces articles pourraient servir de prétexte à une surveillance accrue. J’ai examiné les documents pertinents, et l’un des cas étudiés concerne les sanctions passées. Avant la mise en œuvre du JCPOA, nous étions sous le coup de sanctions, mais nous parvenions tout de même à importer du matériel. Aujourd’hui, après avoir adhéré au JCPOA et pris des engagements spécifiques, monsieur Mohammad Djavad Zarif, ancien ministre des affaires étrangères de l’Iran, et d’autres responsables affirment que seul le « groupe de travail sur les achats » est autorisé à superviser ces importations, et que toute décision doit être prise par consensus.
Cette situation soulève une contradiction : pourquoi des pays comme l’Arabie saoudite ou le Qatar, qui n’ont pas nécessairement les compétences techniques requises, devraient-ils jouer un rôle dans la supervision du programme nucléaire iranien dans le cadre du JCPOA ? Leur implication semble davantage motivée par des considérations géopolitiques que par une volonté réelle de garantir la conformité de l’Iran aux engagements pris. »
3. Quel est le rôle de Djibouti dans le JCPOA ?
Aucun rôle officiel. Ni le JCPOA ni ses annexes ne citent Djibouti. La surveillance relève de l’AIEA et de la Commission conjointe. Comme tout État membre de l’ONU, Djibouti est tenu de respecter la résolution 2231, mais cela ne lui confère aucun droit d’inspection ou de veto.
4. La place de Djibouti dans le JCPOA : une demande iranienne ?
L’idée que des pays comme Djibouti, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis ou le Qatar participent à la surveillance de l’Iran dans le cadre du Plan d’action global conjoint (JCPOA) suscite des interrogations. Selon Hassan Rouhani, ancien président iranien, dans son ouvrage Sécurité nationale et diplomatie nucléaire (cinquième édition, page 211), il souligne que « l’espion typique est souvent déguisé en espion ». Notamment issus d’agences européennes ou régionales. L’Iran critique cette ingérence, soulignant que ces pays n’ont pas nécessairement les compétences requises pour évaluer son programme nucléaire.
Alors que l’Iran considère l’implication de certains pays du Golfe, tels que l’Arabie saoudite ou le Qatar, dans la surveillance de son programme nucléaire comme une atteinte à sa souveraineté, la situation de Djibouti semble différente. Contrairement à ses voisins du Golfe perçus comme hostiles, Djibouti entretient des relations d’intérêt opaques et diplomatiques avec Téhéran. L’émission télévisée de MehrNews sur le JCPOA datée du 11 juin 2023, coïncide le rétablissement des relations diplomatiques entre Djibouti et l’Iran, selon un communiqué du ministère djiboutien des Affaires étrangères.
Cette synchronisation soulève des questions : Pour Téhéran, la participation de Djibouti pourrait être perçue comme moins intrusive, voire comme une opportunité de s’appuyer sur un partenaire d’intérêt.
Cette évolution révèle une contradiction : pourquoi des pays tiers superviseraient-ils des décisions techniques relevant de groupes spécialisés DE L’Agence internationale de l’énergie atomique ?
En réalité, cette information concorde avec une information que HCH24 avait reçue en 2024. Un ancien responsable du renseignement somalien avait intercepté une discussion entre la fille du président de Djibouti, Madame Haibado Ismaël Omar, et un proche cousin de son mari. La fille du président de Djibouti, qui se trouvait à ce moment-là à Mogadiscio, racontait que sa famille allait ouvrir à Mogadiscio une société d’importation de pétrole iranien à bas prix, car son père aidait Téhéran dans d’autres domaines jugés très importants pour leur sécurité et leur défense. Les Ayatollahs comptaient d’ailleurs le remercier pour cette collaboration.
À suivre…
Hassan Cher
English translation of the article in French.
Iran/Nuclear: What is Djibouti doing in Iran’s nuclear program, according to MehrNews?
1. What is the Joint Comprehensive Plan of Action (JCPOA)?
The Joint Comprehensive Plan of Action (JCPOA) is an international agreement concluded in July 2015 and updated in 2023 between Iran and the E3/EU+3 group (France, Germany, the United Kingdom, the European Union, China, Russia and the United States). Its main objective is to guarantee the exclusively peaceful nature of Iran’s nuclear program in exchange for a gradual lifting of international economic sanctions against Tehran.
Key features :
– Iranian commitments: Limitation of uranium enrichment capacity (3.67%), reduction of fissile material stocks, conversion of the Arak reactor to prevent plutonium production, and enhanced cooperation with the International Atomic Energy Agency (IAEA).
– Lifting of sanctions: UN, EU and US nuclear-related sanctions are suspended, allowing Iran to re-enter the world’s financial and energy markets.
– Verification mechanisms: The IAEA supervises Iran’s nuclear facilities, while a Joint Commission (made up of the signatories) arbitrates disputes via a dispute resolution process.
The JCPOA was endorsed by UN Security Council Resolution 2231 (2015), making it a pillar of the nuclear non-proliferation regime. However, the unilateral withdrawal of the United States in 2018 under Donald Trump, followed by the reimposition of sanctions, has weakened the agreement.
2. Monitoring Iran under the JCPOA: contradictions and questions
Supervision of Iran’s nuclear program is officially entrusted to the IAEA, whose technical inspections are governed by the JCPOA. However, tensions persist around two major issues:
– Contested involvement of third countries
– Dual-use items”, a pretext for extended surveillance
– Mistrust of the IAEA and “spies in disguise”.
The official JCPOA document makes no mention of any role for countries such as Saudi Arabia, the United Arab Emirates, Djibouti or Qatar in the monitoring mechanisms. Yet recent political statements, including a MehrNews television broadcast dated June 11, 2023, refer to “regional interference” in the process. The translation of the MehrNews TV program is as follows:
“Now, countries such as Saudi Arabia, the United Arab Emirates, Djibouti and Qatar are expected to take part in monitoring Iran under the Joint Comprehensive Plan of Action (JCPOA). But what do these countries have to do with this subject? It’s worth noting that, as former Iranian President Rouhani points out on page 211 of his fifth edition of ‘National Security and Nuclear Diplomacy’, some agents of the International Atomic Energy Agency (IAEA) have been described as “real spies disguised as spies.
Furthermore, it is important to remember that agents from European agencies should not generally travel to Iran with military training, nor carry out security surveillance activities. We therefore call for a reduction in such interference.
With regard to dual-use items – i.e. technologies that can be used for both civilian and military purposes, such as X-ray equipment for medical or industrial applications – the Iranian nation needs to pay particular attention to this issue. Indeed, these articles could be used as a pretext for increased surveillance. I have examined the relevant documents, and one of the cases studied concerns past sanctions. Before the JCPOA was implemented, we were under sanctions, but still managed to import equipment. Now, having signed up to the JCPOA and made specific commitments, Mr. Mohammad Djavad Zarif, Iran’s former Foreign Minister, and other officials claim that only the “Procurement Working Group” is authorized to oversee these imports, and that all decisions must be taken by consensus.
This raises a contradiction: why should countries like Saudi Arabia or Qatar, which don’t necessarily have the requisite technical skills, play a role in overseeing Iran’s nuclear program under the JCPOA? Their involvement seems to be motivated more by geopolitical considerations than by a genuine desire to guarantee Iran’s compliance with the commitments made.”
Link to MehrNews broadcast: (https://www.mehrnews.com/news/5806882/%D8%A8%D8%B1%D8%A7%D8%B3%D8%A7%D8%B3-%D8%A8%D8%B1%D8%AC%D8%A7%D9%85-%D8%B9%D8%B1%D8%A8%D8%B3%D8%AA%D8%A7%D9%86-%D9%88-%D8%AC%DB%8C%D8%A8%D9%88%D8%AA%DB%8C-%D8%A8%D8%B1-%D8%B9%D9%85%D9%84%DA%A9%D8%B1%D8%AF-%D8%A7%DB%8C%D8%B1%D8%A7%D9%86-%D9%86%D8%B8%D8%A7%D8%B1%D8%AA-%D9%85%DB%8C-%DA%A9%D9%86%D9%86%D8%AF )
3. What is Djibouti’s role in the JCPOA?
No official role. Neither the JCPOA nor its annexes mention Djibouti. Monitoring is the responsibility of the IAEA and the Joint Commission. Like all UN member states, Djibouti is bound by Resolution 2231, but this does not give it any right of inspection or veto.
4. Djibouti’s place in the JCPOA: an Iranian request?
The idea that countries such as Djibouti, Saudi Arabia, the United Arab Emirates and Qatar should be involved in monitoring Iran under the Joint Comprehensive Plan of Action (JCPOA) raises questions. In his book National Security and Nuclear Diplomacy (fifth edition, page 211), former Iranian President Hassan Rouhani points out that “the typical spy is often disguised as a spy”. Notably from European or regional agencies. Iran criticizes this interference, pointing out that these countries do not necessarily have the skills required to assess its nuclear program.
While Iran considers the involvement of certain Gulf countries, such as Saudi Arabia and Qatar, in monitoring its nuclear program as an infringement of its sovereignty, Djibouti’s situation seems different. In contrast to its perceived hostile Gulf neighbors, Djibouti maintains opaque and diplomatic relations of interest with Tehran. The MehrNews TV broadcast on the JCPOA dated June 11, 2023, coincides with the re-establishment of diplomatic relations between Djibouti and Iran, according to a press release from the Djibouti Ministry of Foreign Affairs.
This timing raises questions: For Tehran, Djibouti’s participation could be perceived as less intrusive, or even as an opportunity to lean on a partner of interest.
This development reveals a contradiction: why should non-EU countries supervise technical decisions made by specialized groups OF THE International Atomic Energy Agency?
In fact, this information tallies with one that HCH24 had received in 2024. A former Somali intelligence official had intercepted a discussion between the daughter of the President of Djibouti, Madame Haibado Ismaël Omar, and a close cousin of her husband. The daughter of the President of Djibouti, who was in Mogadishu at the time, said that her family was going to open a company in Mogadishu to import cheap Iranian oil, as her father was helping Teheran in other areas considered very important for their security and defense. The Ayatollahs intended to thank him for this collaboration.
To be continued…
Hassan Cher