
Djibouti/Somaliland : Boreh, Acquitté à Londres, Piégé à Hargeisa ? Les Dessous d’un Scandale d’État

1. Pourquoi Djibouti a engagé des poursuites contre Boreh en 2014?
La République de Djibouti a engagé des poursuites contre Abdourahman Boreh pour corruption, fraude, et abus de pouvoir liés à des transactions opaques impliquant des projets stratégiques, notamment le terminal pétrolier Horizon et le terminal à conteneurs de Doraleh. Les accusations principales incluent :
– Dissimulation de participations : Boreh aurait secrètement détenu 30 % des parts d’Horizon Djibouti Terminals Limited (25 % via Boreh International FZE et 5 % via Essense Management Limited), sans en informer le gouvernement, alors qu’il négociait au nom de l’État.
– Contrats de conseil fictifs : Il aurait perçu 1,3 million de dollars via des sociétés offshore (dont S Flame) pour des services jamais rendus, qualifiés par le juge britannique d’« impostures ». Ces paiements, versés par DP World, étaient dissimulés au Président Guelleh.
– Négociations déséquilibrées : Boreh aurait obtenu une participation personnelle de 5 % dans le terminal de Doraleh à un prix symbolique, tandis que Djibouti ne percevait qu’une redevance de 5 %, jugée inférieure aux standards du secteur.
Références :
– Les jugements de la Haute Cour britannique ([2015] EWHC 769 et [2016] EWHC 405) détaillent les contrats fictifs et les conflits d’intérêts.
2. Combien d’entités djiboutiennes ont porté plainte contre Boreh ?
Trois entités publiques djiboutiennes ont engagé des poursuites :
a. La République de Djibouti (premier demandeur), représentant l’État.
b. L’Autorité des Ports et des Zones Franches de Djibouti (DPFZA) (deuxième demandeur), chargée de superviser les infrastructures portuaires.
c. Port de Djibouti S.A. (PAID) (troisième demandeur), gestionnaire du port de Doraleh.
Ces entités agissent sous le contrôle direct du Président Ismail Omar Guelleh, selon les documents judiciaires.
Références :
– Les jugements citent explicitement ces trois entités comme plaignantes, avec Guelleh décrit comme l’« ultime décideur » de la procédure.
3. Quelles sont les offshore ciblées et les juridictions saisies ?
Sociétés offshore visées :
– Boreh International FZE (2ᵉ défendeur) : Détient 25 % d’Horizon Djibouti Terminals.
– Essense Management Limited (3ᵉ défendeur) : Détient 5 % supplémentaires.
– Net Support Holdings Limited (4ᵉ défendeur) : Impliquée dans des transactions non précisées.
– S Flame : Non nommée comme défendeur, mais utilisée pour recevoir des paiements de DP World (1,3 million USD).
Juridictions saisies :
a. Haute Cour de Londres (Commercial Court) : Principal tribunal pour les litiges liés à la corruption et aux contrats internationaux.
b. British Virgin Islands High Court : Saisie le 8 novembre 2013 pour traquer les actifs des offshores.
Références :
– Les jugements britanniques ([2015] et [2016]) et la procédure aux Îles Vierges britanniques (affaire Winnington Global Holdings Ltd. et al.) mentionnent ces structures (Winnington Global Holdings Ltd., Net Support Holdings Limited, Unique Plus Finance Ltd., Precious Water Finance Limited, Emerald Sea Co Offshore Limited).
4. Est-ce que Guelleh/Haid aiment Boreh ? Contexte Boreh vs Guelleh
La relation entre Guelleh et Boreh est ouvertement conflictuelle, marquée par une rupture politique et juridique :
– Ancienne collaboration : Boreh était un proche conseiller de Guelleh et un acteur clé des négociations avec DP World jusqu’en 2008.
– Basculement en 2009 : Guelleh accuse Boreh de l’avoir trompé sur ses intérêts personnels dans les projets portuaires. Guelleh déclare « n’était pas au courant » des parts de Boreh dans Horizon.
Conclusion : Le conflit reflète une lutte de pouvoir liée à la mainmise sur les infrastructures stratégiques de Djibouti. Guelleh utilise le système judiciaire pour isoler Boreh, désormais en exil à Dubaï.
5. Est-ce que Boreh a gagné contre l’état djiboutien ?
Ce qu’a dit le juge (Sir Jeremy Cooke)
- Les accusations de la République de Djibouti reposaient en grande partie sur des preuves trompeuses.
- Le témoin principal de Djibouti, l’ex premier ministre Dileita Mohamed Dileita, a été jugé peu crédible.
- Le juge a conclu que M. Boreh n’avait pas commis de fraude ou de corruption dans les affaires visées.
- Il a ajouté que l’affaire intentée contre Boreh était motivée politiquement, et non juridiquement.
Citation du jugement :
« The Republic of Djibouti has not made out its case. […] Mr Boreh was not guilty of dishonesty, corruption or breach of fiduciary duty. »
6. Boreh à Hargeisa le 6 avril 2025
Le dimanche 6 avril 2025, Abdourahman Mohamed Mahmoud Boreh est arrivé à Hargeisa (Somaliland) dans la plus grande discrétion, officiellement pour mener des discussions avec le régime de Ismaël Omar Guelleh et son épouse Kadra Mahamoud Haid.
Deux figures clés de la sécurité nationale djiboutienne ont été mandatés : le colonel Hassan Said Kahireh, chef du Service de Documentation de Sécurité (SDS), et son adjoint, le commandant Aboubaker Ahmed Moussa. Les deux hommes ont séjourné chez Mohamed Said Guedi, un proche collaborateur d’Ismaël Omar Guelleh, afin de camoufler leur présence à Hargeisa.
Objet des discussions
Les échanges entre Boreh et les responsables de la sécurité djiboutienne ont porté sur plusieurs points stratégiques :
a. Logistique du retour :
– Le nombre de personnes devant accompagner Boreh lors de son éventuel retour à Djibouti.
– La taille et la composition de son équipe de sécurité personnelle.
b. Revendications politiques :
– La possibilité pour Boreh de nommer des membres de son équipe à des postes clés (ministères, directions générales, etc.).
– Son rôle potentiel en tant que leader politique incontesté des deux frères Moussa (Saad Moussa et Yonis Moussa), deux poids du paysage politique djiboutien.
Pourquoi Guelleh/Haid « courent-ils après Boreh » ?
Selon des sources proches du dossier, le couple présidentiel nourrit une rancœur tenace envers Boreh, qu’ils accusent de les avoir « roulés dans la farine » durant des années. Leur objectif affiché de « réconciliation » cacherait en réalité une manœuvre pour piéger Boreh :
– Stratégie d’appât : En feignant de lui offrir des garanties de sécurité et des avantages politiques, Guelleh/Haid cherchent à l’inciter à rentrer à Djibouti.
– Plan d’interpellation : Dès son arrivée sur le territoire djiboutien, Boreh serait immédiatement arrêté et détenu à Haramous, le siège du pouvoir.
– Confiscation des actifs : Des documents préparés à l’avance lui seraient imposés à signer pour lui déposséder de ses sociétés offshore, comptes bancaires et autres avoirs internationaux.
Une rencontre sous haute tension
Cette réunion à Hargeisa s’inscrit dans une longue série de manipulations orchestrées par le régime djiboutien. Pour de nombreux observateurs, il s’agirait d’une nouvelle « berceuse » destinée à endormir la méfiance de Boreh, permettant à Guelleh/Haid de régler définitivement leurs comptes avec l’homme qui, selon eux, a dilapidé leurs épargnes personnelles et sapé leur autorité.
À suivre… – https://7kbw.co.uk/wp-content/uploads/2016/05/Final-Boreh-Judgment-02-03-16-READ-ONLY.pdf
Hassan Cher
English translation of the article in French.
Djibouti/Somaliland: Boreh, Acquitted in London, Trapped in Hargeisa? The Underside of a State Scandal
1. Why did Djibouti prosecute Boreh in 2014?
The Republic of Djibouti brought charges against Abdourahman Boreh for corruption, fraud, and abuse of power related to opaque transactions involving strategic projects, including the Horizon oil terminal and the Doraleh container terminal. The main charges include:
– Concealment of shareholdings: Boreh is alleged to have secretly held a 30% stake in Horizon Djibouti Terminals Limited (25% via Boreh International FZE and 5% via Essense Management Limited), without informing the government, while negotiating on behalf of the state.
– Fictitious consultancy contracts: He allegedly received $1.3 million via offshore companies (including S Flame) for services never rendered, described by the British judge as “impostures”. These payments, made by DP World, were concealed from President Guelleh.
– Unbalanced negotiations: Boreh allegedly obtained a 5% personal stake in the Doraleh terminal at a symbolic price, while Djibouti received only a 5% royalty, deemed below industry standards.
References
– UK High Court judgments ([2015] EWHC 769 and [2016] EWHC 405) detail fictitious contracts and conflicts of interest.
2. How many Djiboutian entities have filed lawsuits against Boreh?
Three Djiboutian public entities have filed lawsuits:
a. The Republic of Djibouti (first plaintiff), representing the State.
b. The Djibouti Ports and Free Zones Authority (DPFZA) (second plaintiff), responsible for overseeing port infrastructures.
c. Port de Djibouti S.A. (PAID) (third applicant), manager of the port of Doraleh.
These entities act under the direct control of President Ismail Omar Guelleh, according to court documents.
References:
– The judgments explicitly name these three entities as plaintiffs, with Guelleh described as the “ultimate decision-maker” in the proceedings.
3. Which offshore companies are targeted and which jurisdictions are involved?
Offshore companies targeted:
– Boreh International FZE (2ᵉ defendant): Holds 25% of Horizon Djibouti Terminals.
– Essense Management Limited (3ᵉ defendant): Holds a further 5%.
– Net Support Holdings Limited (4ᵉ defendant): Involved in unspecified transactions.
– S Flame: Not named as a defendant, but used to receive payments from DP World (USD 1.3 million).
Jurisdictions seized:
a. High Court of London (Commercial Court): Main court for disputes relating to corruption and international contracts.
b. British Virgin Islands High Court: Seized on November 8, 2013 to track down offshore assets.
References:
– The British judgments ([2015] and [2016]) and the proceedings in the British Virgin Islands (Winnington Global Holdings Ltd. et al. case) mention these structures (Winnington Global Holdings Ltd, Net Support Holdings Limited, Unique Plus Finance Ltd, Precious Water Finance Limited, Emerald Sea Co Offshore Limited).
4. Do Guelleh/Haid like Boreh? Background Boreh vs Guelleh
The relationship between Guelleh and Boreh is openly conflictual, marked by a political and legal split:
– Former collaboration: Boreh was a close advisor to Guelleh and a key player in negotiations with DP World until 2008.
– Changeover in 2009: Guelleh accuses Boreh of misleading him about his personal interests in the port projects. Guelleh declares that he “was not aware” of Boreh’s shares in Horizon.
Conclusion: The conflict reflects a power struggle for control over Djibouti’s strategic infrastructure. Guelleh is using the judicial system to isolate Boreh, now in exile in Dubai.
5. Did Boreh win against the Djiboutian state?
What the judge (Sir Jeremy Cooke) said
– The Republic of Djibouti’s accusations were largely based on misleading evidence.
– Djibouti’s main witness, former Prime Minister Mohamed Dileita, was deemed to lack credibility.
– The judge concluded that Mr. Boreh had not committed fraud or corruption in the cases in question.
– He added that the case against Boreh was politically, not legally, motivated.
Quote from the judgment:
“The Republic of Djibouti has not made out its case. […] Mr Boreh was not guilty of dishonesty, corruption or breach of fiduciary duty.”
6. Boreh in Hargeisa on April 6, 2025
On Sunday April 6, 2025, Abdourahman Mohamed Mahmoud Boreh arrived in Hargeisa (Somaliland) under the utmost secrecy, officially to hold talks with the regime of Ismaël Omar Guelleh and his wife Kadra Mahamoud Haid.
Two key figures in Djiboutian national security were mandated: Colonel Hassan Said Kahireh, head of the Security Documentation Service (SDS), and his deputy, Major Aboubaker Ahmed Moussa. The two men stayed at the home of Mohamed Said Guedi, a close associate of Ismaël Omar Guelleh, in order to camouflage their presence in Hargeisa.
Subject of discussions
Discussions between Boreh and Djibouti security officials focused on several strategic points:
a. Return logistics :
– The number of people to accompany Boreh on his eventual return to Djibouti.
– The size and composition of his personal security team.
b. Political demands:
– Boreh’s ability to appoint members of his team to key positions (ministries, directorates-general, etc.).
– His potential role as the undisputed political leader of the two Moussa brothers (Saad Moussa and Yonis Moussa), two heavyweights of the Djiboutian political landscape.
Why are Guelleh/Haid “after Boreh”?
According to sources close to the matter, the presidential couple harbor a tenacious grudge against Boreh, whom they accuse of having “rolled them in flour” for years. Their stated aim of “reconciliation” in fact conceals a manoeuvre to trap Boreh:
– Baiting strategy: By pretending to offer him security guarantees and political advantages, Guelleh/Haid seek to induce him to return to Djibouti.
– Arrest plan: Upon arrival in Djibouti, Boreh would be immediately arrested and detained in Haramous, the seat of power.
– Confiscation of assets: Pre-prepared documents would be required for him to sign in order to dispossess him of his offshore companies, bank accounts and other international assets.
A meeting under high tension
This meeting in Hargeisa is part of a long series of manipulations orchestrated by the Djibouti regime. For many observers, it is a new “lullaby” designed to put Boreh’s distrust to sleep, allowing Guelleh/Haid to settle scores once and for all with the man who, in their view, has squandered their personal savings and undermined their authority.
To be continued… – https://7kbw.co.uk/wp-content/uploads/2016/05/Final-Boreh-Judgment-02-03-16-READ-ONLY.pdf
Hassan Cher