Djibouti : Scandale politico-financier à la CNSS de Djibouti, enquête, réseaux d’influence et espionnage interne 

Djibouti : Scandale politico-financier à la CNSS de Djibouti, enquête, réseaux d’influence et espionnage interne 

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Une affaire de détournement de fonds et d’espionnage interne secoue la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS), éclaboussant des figures clés de l’État djiboutien. La directrice générale de l’institution, Deka Ahmed Robleh, a déposé plainte contre X, déclenchant une enquête menée par la Section de Recherches et d’Investigations (SRD) de la gendarmerie nationale, unité placée sous l’autorité directe du Chef d’État-Major de la Gendarmerie. 

 Interpellations et soupçons de boucs-émissaires 

L’enquête a conduit à l’interpellation, avant-hier, de deux employés de la CNSS : un jeune informaticien et un contrôleur de retraites, Ayanleh Osman, suspendu sans motif depuis plusieurs semaines. Ce dernier est issus du sous-clan « Ali-Ade/Badarahan/Mamasan ». Tous deux  affirment être instrumentalisés pour étouffer un scandale bien plus vaste. « Cette affaire nous dépasse. Nous n’avons rien à voir là-dedans », ont-ils déclaré aux enquêteurs, évoquant des rumeurs internes pointant un réseau liant des hauts responsables de la CNSS, les enfants du président Ismaël Omar Guelleh, des dirigeants du Port de Djibouti et le Chef d’État-Major général de l’armée. 

Les accusations de la directrice : détournements et vidéos compromettantes 

Selon les éléments de la plainte, Deka Ahmed Robleh accuse les deux interpellés d’avoir divulgué des informations sensibles à des activistes en exil. Ces fuites révèleraient des détournements de fonds impliquant la directrice elle-même et les enfants du président, notamment l’achat d’une villa à Nice (France) financée par la CNSS pour le compte d’une fille de Guelleh. 

Autre volet explosif : des caméras auraient été installées clandestinement dans son bureau, collectant des données dont la destination reste mystérieuse. « À qui étaient destinés ces enregistrements ? À la famille présidentielle ? À une puissance étrangère ? À la Sécurité d’État (SDS) ? », s’interrogent les enquêteurs. 

 Un réseau tentaculaire et des montants colossaux 

L’affaire a pris une tournure plus grave ce jeudi 3 avril avec l’interpellation d’Ahmed Saad, directeur administratif et financier de la CNSS. Ahmed Saad est du sous-clan « Reer-Liban/Badarahan/Mamasan », il est cousin très proche du commandant du Port de Djibouti, Mohamed Moussa Abar, et du Chef d’État-Major général des armées, le général Zakaria Cheikh Ibrahim. Son frère, Abdourahman Saad, est quant à lui le directeur administratif de la capitainerie du port. 

La SRD a déjà identifié un « réseau bien rodé », avec des centaines de millions de francs djiboutiens évaporés et des preuves audiovisuelles accablantes. Les enquêteurs soulignent que Mohamed Moussa Abar et Zakaria Cheikh Ibrahim multiplieraient les pressions pour étouffer l’affaire et libérer leur cousin Ahmed Saad. 

Guelleh, le procureur et l’arme du chantage 

Malgré les manœuvres, des sources proches de la présidence indiquent qu’Ismaël Omar Guelleh aurait ordonné au procureur de la République de « poursuivre la procédure jusqu’à ce que toutes les personnalités du CNSS-gate soient démasquées ». Objectif supposé : utiliser ces dossiers « bien scellés » pour faire pression sur les cibles visées, consolidant son emprise sur les élites de Qawlaysato. 

Conclusion incertaine pour les interpellés 

Reste une question brûlante : les deux jeunes employés initialement interpellés, présentés comme des bouc-émissaires, finiront-ils libres ou écroués à Gabode, la prison centrale de Djibouti ? Dans un pays où les scandales politico-financiers se règlent souvent dans l’ombre, cette affaire pourrait révéler des fractures au sein même du pouvoir clanico-mafieux de Djibouti. 

À suivre.

Hassan Cher

English translation of the article in French.

Djibouti: Political-financial scandal at Djibouti’s CNSS, investigation, networks of influence and internal espionage 

A case of embezzlement and internal espionage has rocked the Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS), splashing key figures in the Djiboutian state. The institution’s Director General, Deka Ahmed Robleh, filed a complaint against X, triggering an investigation by the National Gendarmerie’s Section de Recherches et d’Investigations (SRD), a unit under the direct authority of the Chief of Staff of the Gendarmerie. 

 Arrests and suspicion of scapegoats 

The investigation led to the arrest, the day before yesterday, of two CNSS employees: a young IT specialist and a pension controller, Ayanleh Osman, who had been suspended without cause for several weeks. The latter is from the “Ali-Ade/Badarahan/Mamasan” sub-clan. Both claim to have been used to cover up a much wider scandal. “This affair is beyond us. We have nothing to do with it”, they told investigators, referring to internal rumors pointing to a network linking senior CNSS officials, the children of President Ismaël Omar Guelleh, executives of the Port of Djibouti and the army’s Chief of General Staff. 

The director’s accusations: embezzlement and compromising videos 

According to the complaint, Deka Ahmed Robleh accuses the two of having leaked sensitive information to exiled activists. The leaks revealed misappropriation of funds involving the director herself and the president’s children, in particular the purchase of a villa in Nice (France) financed by the CNSS on behalf of one of Guelleh’s daughters. 

Another explosive aspect: cameras were allegedly installed clandestinely in his office, collecting data whose destination remains a mystery. “Who were these recordings intended for? The presidential family? A foreign power? To State Security (SDS)?” ask the investigators. 

 A sprawling network and colossal sums of money 

The case took a more serious turn on Thursday April 3, with the arrest of Ahmed Saad, Administrative and Financial Director of CNSS. Ahmed Saad is from the “Reer-Liban/Badarahan/Mamasan” sub-clan, and is a very close cousin of the Port of Djibouti Commander, Mohamed Moussa Abar, and the Chief of the Armed Forces General Staff, General Zakaria Cheikh Ibrahim. His brother, Abdourahman Saad, is the administrative director of the port authority.  The SRD has already identified a “well-functioning network”, with hundreds of millions of Djibouti francs evaporated and damning audiovisual evidence. The investigators point out that Mohamed Moussa Abar and Zakaria Cheikh Ibrahim are stepping up pressure to hush up the affair and free their cousin Ahmed Saad. 

Guelleh, the prosecutor and the weapon of blackmail 

Despite these maneuvers, sources close to the presidency indicate that Ismaël Omar Guelleh has ordered the public prosecutor to “pursue the procedure until all the personalities involved in CNSS-gate are unmasked”. The supposed aim: to use these “well-sealed” files to put pressure on the intended targets, consolidating his hold over the Qawlaysato elites. 

Conclusion uncertain for those arrested

A burning question remains: will the two young employees initially questioned, presented as mere links in a corrupt system, end up free or imprisoned in Gabode, Djibouti’s central prison? In a country where politico-financial scandals are often settled in the shadows, this case could reveal fractures at the very heart of Djibouti’s clan-mafia power structure. 

To be continued.

Hassan Cher

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Authored by: Hassan Cher Hared

Hassan Cher Hared